Monthly Archives: October 2019

De l’UERSS

L’Europe n’est pas vieille ; ce sont ses institutions qui étaient trop vieilles pour elles. Les peuples d’Europe ne sont pas vieux ; ce sont les élites européennes qui auraient besoin de se renouveler, qui s’y refusent, qui nous encombrent de leurs déchets.” George Bernanos

Le terrible secret de tout conflit est que le vainqueur finit souvent par devenir l’ennemi qu’il a combattu.

En 1989, les démocraties libérales triomphaient du communisme.

Vingt ans plus tard, elles sont devenues le totalitarisme qu’elles ont vaincu.

Excessif ? Caricatural ?

Faisons l’inventaire:

-Pouvoir exercé par une nomenklatura incompétente et corrompue apparaissant aux yeux du peuple comme de plus en plus illégitime

-Organisations de plus en plus bureaucratiques et tentaculaires cherchant à réglementer chaque aspect de la vie du citoyen sans que ce dernier ne puisse avoir de véritables prises sur elles

-Médias aux ordres du pouvoir, défendant systématiquement, parfois au mépris de l’évidence ou de la logique, la ligne du parti

-Sélection et accès aux responsabilités fondés non pas sur la compétence ou le sens l’intérêt général mais sur la loyauté et la pureté idéologique, le « progressisme » ayant remplacé le marxisme-léninisme

-Intelligentsia subventionnée par le système qui a remplacé l’éloge du prolétariat par celui du métissage et du vivre-ensemble et la dénonciation de la « bourgeoisie » par celle du  « populisme »

-Chasse aux dissidents menée par les pouvoirs politiques, médiatiques et judiciaires allant jusqu’à une violente répression policière dans le cas des gilets jaunes

-Pouvoir qui plutôt que de reconnaître ses erreurs et de se remettre en cause, renforce la répression, pratique le déni et accélère la tendance

Illégitimes, inefficaces et construits sur des fondations branlantes, de tels régimes finissent toujours par s’effondrer. Le mur du « progressisme » tombera comme est tombé celui de Berlin.

De la psychiatrisation du monde

Après “Cracked” (2013), livre, fondamental consacré à l’imposture de la psychiatrie moderne et à l’inflation des troubles mentaux en Occident1, le chercheur en psychologie et psychothérapeute britannique James Davies revient avec “Sedated”, un livre qui s’intéresse cette fois aux causes de cette explosion des problèmes de santé mentale et aux réponses principalement biomédicales qui y sont apportées.

James Davies commence par rappeler un paradoxe déjà évoqué dans son premier ouvrage: bien que les dépenses en matière de santé mentale et la consommation de médicaments psychotropes n’aient jamais été aussi fortes, on assiste à une explosion des troubles mentaux alors, qu’en toute logique, les efforts conjugués des traitements prescrits et la prise en charge accrue devraient conduire à une amélioration de la situation. Il rappelle également que la plupart des troubles mentaux ne possèdent aucune réalité biologique observable et que leur inclusion dans les manuels de psychiatrie comme le célèbre DSM repose sur un consensus scientifique plutôt que sur des bases scientifiques solides. Pour finir, James Davies souligne que de nombreuses études prouvent non seulement que l’effet des antidépresseurs se distingue à peine du placebo mais que l’utilisation de ce dernier dans le cadre de traitement au long cours contribue à dégrader significativement la santé mentale plutôt que de l’améliorer.

Selon James Davies, cette situation trouve son origine dans les liens incestueux noués entre le monde médical et Big Pharma, avec la complicité des gouvernements et des autorités de régulation. Dans « Sedated », James Davies dépasse ce constat et entreprend de se pencher sur les causes profondes du mal-être occidental et l’augmentation croissante du nombre de personnes souffrant de troubles mentaux et prenant des traitements médicamenteux pour ces derniers. Selon James Davies, ce phénomène est due à deux tendances : d’une part, la volonté de psychiatriser et de médicaliser un nombre grandissant d’états mentaux et de comportements ; d’autre part, depuis les années soixante-dix, le développement d’un système socio-économique extrêmement nocif pour la santé mentale. Or, au lieu d’aider les personnes à comprendre l’impact de système sur leur psychisme, la plupart des professionnels de la santé mentale sont formés et incités à dédouaner le système pour faire porter l’entière responsabilité de son mal-être sur l’individu.

Davies donne l’exemple de plusieurs programmes mis en place dans les entreprises ou au sein du système de soin britannique, comme le IAPT2. Alors que ces programmes prétendent aider à identifier les troubles mentaux et à les surmonter, ceux-ci ne s’attaquent jamais aux causes psycho-sociales des problèmes: surcharge de travail, contrats précaires, pression managériale, déshumanisation mais expliquent à l’individu qu’il est entièrement responsable de ce qu’il lui arrive et qu’il n’appartient qu’à lui de surmonter ses difficultés. Pour Davies, alors que le mal-être ressenti par les individus constitue une réponse normale et légitime à un problème structurel, celui-ci est immédiatement médicalisé et imputé à un défaut de l’individu et non du système lui-même. Par exemple, une personne souffrant de ne pas pouvoir conserver la garde de sa fille à cause de l’enchaînement de contrats précaires va être diagnostiquée comme « dépressive » et se verra prescrire une combinaison destructrice de médicaments et de séminaire de « pensée positive », du type : « Le succès est un état d’esprit » ou « Il est toujours trop tôt pour abandonner. »

Davies poursuit son exposé en montrant comment ces problèmes se trouvent aggravés par une approche productiviste du management qui évalue la performance en fonction d’indicateurs numériques arbitraires plutôt que par la résolution des problèmes et une culture matérialiste qui encourage l’avoir au détriment de l’être et présente la consommation de produits, de loisirs, de médicaments comme la réponse à des dysfonctionnements d’ordres structurel.

Face à une idéologie destrutrice qui a désormais infiltrée toutes les sphères de la société, du monde du travail à l’éducation en passant par le politique, la conclusion de James Davies est sans appel: alors qu’ils prétendent désormais se soucier des problèmes grandissants de santé mentale, nos dirigeants cherchent à réalité à faire porter leur entière responsabilité sur les individus plutôt que sur le système corrompu qui les broie. Pour nous en sortir, la priorité doit être un changement radical et systémique, à la fois de la façon dont nous abordons la santé mentale mais aussi, et plus largement, des fondements philosophiques et économiques sur lequel est fondé un système qui ne peut que conduire à une crise de santé publique sans précédent.

Si ce livre, plus ambitieux dans son approche et plus éloigné sur certains points du domaine d’expertise de l’auteur, s’avère moins percutant que “Cracked”, il représente néanmoins une contribution très importante au combat contre la logique économique et politique moderne ainsi qu’une illustration supplémentaire de l’adage selon lequel être adapté à une société malade n’est pas un signe de bonne santé.

1Malgré ou à cause des révélations explosives qu’il contient, « Cracked » n’a toujours pas été traduit en français. Dans le Volume I des Essais (2020), nous avions déjà consacré un essai à ce livre.

2Improving Access to Psychological Therapies (améliorer l’accès aux thérapies psychologiques)

De la psychiatrie (Cracked)

Du Grand Réveil

De la psychiatrie (Cracked)

*

James Davies est un psychologue et un anthropologue anglais diplômé d’Oxford.

Après plusieurs années de pratique de la psychologie, il s’est mis à se poser un grand nombre de questions dérangeantes sur son métier et sur la psychiatrie.

Existe-t-il des bases scientifiques solides sur les nombreux troubles mentaux recensés par les manuels ?

Les antidépresseurs prescrits en masse sont-ils vraiment efficaces ?

Comment expliquer cette inflation massive des troubles mentaux au point que près d’un quart de la population américaine ou anglaise en soit aujourd’hui affecté ?

Pour répondre à ces questions, James Davies s’est lancé dans une grande enquête, consultant des milliers d’études et interrogeant les sommités mondiales de la psychiatrie.

 Ses résultats sont sidérants.

On y apprend que le DSM, la bible de la psychiatrie mondiale, a été rédigé pour l’essentiel avec des critères d’exigence scientifiques faibles, voire inexistants.

On y apprend également que la plupart des troubles mentaux qui y sont recensés n’ont d’une part aucune réalité biologique mesurable et d’autre part que leur inclusion repose sur un consensus social plutôt que sur une véritable base scientifique.

On y voit ensuite que l’effet des antidépresseurs sur la grande majorité des patients se distingue très difficilement du placebo mais qu’en revanche ces derniers possèdent des effets secondaires néfastes qui peuvent aller jusqu’à l’altération de la personnalité.

Pour terminer, Davies montre que les grands gagnants de toute cette affaire sont les grands laboratoires pharmaceutiques qui ont noués des liens incestueux avec le monde de la psychiatrie.

Pour dire les choses clairement, ce livre constitue une remise en cause complète des fondations de la psychologie et de la psychiatrie moderne.

Dans un monde où de plus en plus de comportements sont médicalisés et psychiatrisés et où les systèmes de santé publiques doivent faire face aux coûts faramineux de ces traitements, la lecture de ce livre devrait être considérée de salut public. « Cracked » devrait être lu par tous les psychologues et les psychiatres mais aussi par les hommes politiques, les magistrats, les travailleurs sociaux et tous ceux qui sont concernés de près ou de loin par la question des troubles mentaux.

Paru en 2013, Cracked n’a toujours pas été traduit en français. Il serait temps qu’un éditeur se penche sur la question.

Cracked, James Davies

De l’origine abiotique du pétrole

Extraits de l’article de J. F. Kenney publié sur le site « Gas Resources » sous le titre « An introduction to the modern petroleum science, and to the Russian-Ukrainian theory of deep, abiotic petroleum origins. »

Traduit de l’anglais par Stanislas Berton

« Les articles ci-dessous présentent, sous différentes perspectives, la théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole. Compte tenu du fait que ce sujet reste méconnu par la plupart des personnes vivant en dehors de l’ex-URSS, un rapide résumé de cette théorie, de sa provenance et de son histoire est donné ici.

1. Les points fondamentaux de la théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole.

La théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole constitue un ensemble complet de connaissances scientifiques qui recouvre les sujets de l’origine chimique des molécules d’hydrocarbure qui composent le pétrole naturel, les processus physiques qui causent leur concentration sur terre, les processus dynamiques du mouvement de ces matériaux dans des réservoirs géologiques de pétrole et la localisation et l’économie de la production de pétrole. La théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole admet que le pétrole constitue un matériau primordial d’origine profonde qui s’est frayé un chemin jusqu’à la croûte terrestre. En résumé et pour dire les choses clairement, le pétrole n’est pas une « énergie fossile » et ne possède aucun lien intrinsèque avec des dinosaures morts (ou toute autre forme de déchets biologiques) dans des « sédiments » (ou tout autre endroit).

La théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole est fondée sur des raisonnements scientifiques rigoureux en accord avec les lois de physique et de la chimie ainsi que sur des observations géologiques détaillées, et respecte les principes généralement admis de la physique/chimie sur lesquels elle s’appuie. La majeure partie de la théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole a été développée à partir des sciences de la chimie et de la thermodynamique, et en conséquence, la théorie moderne a toujours considéré comme central le principe selon lequel la génération des hydrocarbures devait se produire, comme toute forme de matière, dans le respect des lois générales de la thermodynamique chimique. Sur ce point, la science pétrolière moderne russo-ukrainienne diffère fortement de tout ce qui est parvenu à se faire passer pour des « théories » dans le domaine de la géologie, en Angleterre comme aux États-Unis.

Comme nous allons le montrer dans cette série d’articles, le pétrole ne possède aucune association intrinsèque avec des matériaux biologiques. Les seules molécules d’hydrocarbures qui font exception à cette règle sont le méthane, le type d’alcane d’hydrocarbure possédant le potentiel chimique le plus faible de tous les hydrocarbures et, dans une moindre mesure, l’éthane, l’alcane au potentiel chimique le plus faible de la série moléculaire homologue. Seul le méthane possède une stabilité thermodynamique au régime de température et de pression qui règne à proximité de la croûte terrestre et peut, en conséquence, apparaître de façon spontanée à cet endroit, comme cela a en effet pu être observé dans les cas de gaz d’égouts ou de marais. Cependant, le méthane est pratiquement la seule molécule d’hydrocarbure possédant de telles caractéristiques au sein de cette famille thermodynamique ; pratiquement toutes les autres molécules, à l’exception de plus légères, sont polymorphes à haute pression du système hydrogène-carbone. La génération spontanée des hydrocarbures plus lourds, pétrole inclus, ne peut se produire qu’à des régimes de haute pression de l’ordre du multi-kilobar, comme cela sera démontré dans les articles suivants. 

2.      Les origines historiques de la science pétrolière, avec une pointe d’ironie

Il est possible de considérer que l’histoire de la science pétrolière commença en 1757 quand le grand savant Mikhail V. Lomonosov formula l’hypothèse que le pétrole pouvait provenir de déchets biologiques. Utilisant les capacités d’observation rudimentaires et les outils analytiques évidemment limités disponibles à son époque, Lomonosov suggéra que : « « l’huile de roche » (le pétrole) se forma lorsque les corps des animaux marins et autres se trouvèrent enterrés dans des sédiments et, suite au passage du temps et sous l’influence de la pression et de la chaleur, se transformèrent en « huile de roche ». » Telle était la science descriptive pratiquée au XVIIIe siècle par Lomonosov et Linnaeus.

Au début du XIXe siècle, les scientifiques qui commencèrent par rejeter l’hypothèse de Lomonsov furent le célèbre naturaliste et géologue Alexander von Humboldt et le chimiste et thermodynamicien français Louis Joseph Gay-Lussac qui suggérèrent tous deux que le pétrole était un matériau primordial surgissant des grandes profondeurs sans la moindre connexion avec de la matière biologique présente à proximité de la surface terrestre.

Ainsi, ces deux conceptions antagonistes furent défendues par des hommes éminents : la fausse notion ayant été défendue par le plus grand scientifique russe de son temps ; et la proposition abiotique, environ un demi-siècle plus tard, par respectivement deux des plus grands scientifiques français et allemands.

Historiquement, la première réfutation scientifique de l’hypothèse de Lomonosov sur l’origine biologique du pétrole vint des chimistes et des thermodynamiciens. Avec les débuts de la chimie durant le XIXe siècle et en particulier suite à la formulation de la seconde loi de la thermodynamique par Clausius en 1850, l’hypothèse biologique de Lomonosov se retrouva inévitablement contestée.

Le grand chimiste français Marcellin Berthelot fut l’un des plus grands critiques de l’hypothèse de l’origine biologique du pétrole. Berthelot commença par conduire plusieurs expériences, impliquant, entre autres, une série de ce que nous appelons aujourd’hui des réactions de Kolbe et fit la démonstration de la génération de pétrole en dissolvant de l’acier dans un puissant acide. Il produisit une suite de n-alcanes et montra de façon évidente que celles-ci étaient générées en l’absence totale de tout processus ou molécule de nature « biologique ». Les études de Berthelot furent suite étendues et affinées par d’autres scientifiques dont Biasson et Sokolov, lesquels observèrent des phénomènes similaires et conclurent également que le pétrole n’était pas lié à la matière biologique.

Durant le dernier quart du XIXe siècle, le grand chimiste russe Dimitri Mendeleïev examina puis rejeta l’hypothèse de Lomonosov sur l’origine biologique du pétrole. A l’inverse de Berthelot qui n’avait pas offert de suggestion sur la provenance ou la nature du pétrole, Mendeleïev affirma clairement que le pétrole était un matériau primordial provenant des grandes profondeurs. Avec une prescience extraordinaire, Mendeleïev formula l’hypothèse de structures géologiques qu’il appela des « failles profondes » et les identifia à juste titre comme le « maillon faible » dans la croûte terrestre permettant au pétrole de jaillir des profondeurs. Après avoir formulé cette hypothèse, Mendeleïev fut violemment critiqué par les géologues de son temps car la notion de « failles profondes »  était alors inconnue. Aujourd’hui, il est évident que notre compréhension de la tectonique des plaques serait inimaginable sans la reconnaissance de l’existence de ces failles profondes.

3.       La formulation et le développement de la science pétrolière moderne

L’incitation au développement d’une science moderne du pétrole fit son apparition peu de temps après la fin de la 2nde Guerre Mondiale et découla de la reconnaissance de ce qui était alors l’URSS de l’importance du pétrole dans la conduite de la guerre moderne. En 1947, l’URSS avait (d’après les estimations des  « experts » pétroliers) des réserves pétrolières très limitées dont les plus grandes étaient les champs pétrolifères de la région de la péninsule d’Abseron, près de la ville caspienne de Bakou dans l’actuel Azerbaïdjan. A cette époque, les champs pétrolifères près de Bakou étaient considérés comme « épuisés » ou « proche de l’épuisement ». Durant la 2nde Guerre Mondiale, les Soviets avaient occupé les deux provinces du nord de l’Iran ; en 1946, le gouvernement britannique les en avait chassés. Dès 1947, les Soviets avaient pris conscience que ni les américains, les britanniques ou les français n’allaient les laisser opérer au Moyen-Orient ou dans les régions pétrolières d’Afrique, pas plus qu’en Indonésie, en Birmanie, en Malaisie, en Orient ou en Amérique Latine. Le gouvernement de l’Union Soviétique prit conscience que les nouvelles réserves pétrolières devraient être découvertes et exploitées en URSS.

Le gouvernement de l’Union Soviétique mit alors en place un programme de type « Projet Manhattan » [NdT : programme de recherche américain ayant conduit au développement de la bombe atomique] dont la plus grande priorité fut d’étudier chaque aspect du pétrole, de déterminer ses origines ainsi que la façon dont les réserves se constituaient et de définir les stratégies les plus efficaces pour l’exploration pétrolière. A cette époque, la Russie bénéficiait d’un excellent système d’éducation qui avait été mis en place après la révolution de 1917. La communauté russe du pétrole pouvait donc compter sur pratiquement deux générations d’hommes et de femmes scientifiquement compétents et hautement qualifiés, prêts à s’attaquer au problème des origines du pétrole. La science moderne du pétrole fut développée dans les cinq années qui suivirent.

En 1951, la théorie moderne russo-ukrainienne de l’origine abiotique et profonde du pétrole était formulée pour la première fois par Nikolai A. Kudryavtsev au congrès géologique du pétrole de l’Union. Kudryavtsev avait analysé l’hypothèse de l’origine biologique du pétrole et mis en évidence la fausseté des arguments habituellement avancés pour soutenir cette hypothèse. Kudryavtsev fut bientôt rejoint par d’autres géologues russes et ukrainiens dont les premiers furent P. N. Kropotkin, K. A. Shakhvarstova, G. N. Dolenko, V. F. Linetskii, V. B. Porfir’yev, et K. A. Anikiev.

Durant la première décennie de son existence, la théorie moderne de l’origine abiotique du pétrole fit l’objet de nombreux débats et controverses. Entre 1951 et 1965, sous l’influence de Kudryavtsev et Porfir’yev, un nombre croissant de géologues publièrent des articles démontrant les erreurs et les incohérences inhérentes à l’ancienne hypothèse de « l’origine biologique ». Au bout d’une décennie d’utilisation de la théorie moderne, l’erreur de l’ancienne théorie, datant du XVIIIe siècle, d’un pétrole provenant de déchets biologiques contenus dans des sédiments à proximité de la surface, avait été totalement démontrée, l’hypothèse de Lomonosov discréditée et la théorie moderne établie sur des bases fermes.

Il est important de reconnaître que la théorie moderne de l’origine abiotique du pétrole était, au départ, une théorie de géologues. Kudryavtsev, Kropotkin, Dolenko, Porfir’yev et tous les contributeurs à la théorie moderne du pétrole étaient tous des géologues. Leurs arguments étaient ceux de géologues, développés à partir à partir de nombreuses observations, de beaucoup de données, organisés de façon structurée et défendus par la persuasion.

A l’inverse, la pratique générale de la science moderne prédictive, la physique et la chimie en particulier, s’appuie sur des observations ou des données minimales, ne fait que très peu appel aux lois physiques, toujours exprimées par des mathématiques formelles, et a recours aux arguments d’autorité. La preuve prédictive des affirmations des géologues en faveur de la théorie moderne de l’origine profonde abiotique du pétrole a dû attendre près d’un demi-siècle l’arrivée, non seulement de la mécanique moderne de statistiques quantiques, mais également des techniques de la théorie des corps multiples et l’application de la géométrie statistique à l’analyse des fluides denses ainsi que l’émergence de la scaled particle theory [NdT : littéralement « théorie des particules mises à l’échelle. Il s’agit d’une théorie permettant d’exprimer les propriétés thermodynamiques des sphères élastiques infiniment dures]. »

[…]

Note du traducteur :

Dans “l’Homme et la Cité – Volume I », plusieurs essais s’appuient sur les thèses développées par le Club de Rome et le rapport Meadows sur la question de l’épuisement des ressources naturelles. Depuis la rédaction et la publication de ces textes, en 2019 et 2020, j’ai découvert le rôle joué par les mondialistes dans la diffusion de ces thèses et leur utilisation pour justifier à la fois la surveillance et le contrôle accrus des populations ainsi que la mise en œuvre d’un grand programme mondial de dépopulation. Si je maintiens que l’énergie et le taux de rendement énergétique (TRE) jouent un rôle central et sous-estimé dans les systèmes économiques, que la gestion et l’emploi des ressources naturelles doit se faire de façon raisonnée et que la protection de l’environnement et la lutte contre la pollution sont des nécessités vitales, je regrette d’avoir contribué à la diffusion des thèses du Club du Rome sur l’épuisement des ressources inspirées par le projet mondialiste.

Pour aller plus loin :

De la désinformation

Théorie du pétrole abiotique (Wikipédia)

Confession d’un ex-partisan du pic pétrolier (Strategika)

Gas Resources (site de J.F Kenney)

Dossier sur le pétrole abiotique (traductions)

Abiogenic Deep Origin of Hydrocarbons

De la science économique

“Nous avons réussi à transformer la croyance religieuse en crédulité pour tout ce qui parvient à se faire passer pour de la science.” Nassim Nicholas Taleb

Keynes disait qu’un économiste devait être un mathématicien, un historien un homme d’état et un philosophe. A partir des années 70,  cette approche globale fut supplantée par un recours massif à la statistique et à la mathématisation. Aujourd’hui, l’attribution du prix « Nobel » d’économie à Esther Duflo pour son utilisation des random controlled trials (RCT) dans le cadre de programmes de lutte contre la pauvreté confirme que désormais pour être salué comme économiste, il faut  savoir coder et mener des RCT.

Dans le cadre de la démarche scientifique, la seule question valable devrait toujours être : les outils et les concepts utilisés permettent-ils de décrire précisément le réel et d’identifier les grandes lois qui régissent, dans le cas de l’économie, les comportements et les systèmes économiques humains.

Le problème avec ces modèles micro et macroéconomiques reposant sur l’approche classique et néo-classique, c’est qu’aussi élégants et sérieux qu’ils puissent sembler, ils ne décrivent pas comment les agents économiques se comportent dans le monde réel.

Même si les mathématiques et les statistiques sont des outils très utiles, la place centrale qu’ils occupent empêche les économistes d’étudier et de maîtriser des concepts fondamentaux nécessaires à la compréhension du fonctionnement réel de l’économie.

Pour étudier et modéliser un système économique, il est en effet nécessaire maîtriser :

-La physique et plus particulièrement la thermodynamique. En effet, toute activité économique est une activité de transformation de la matière et ce processus demande de l’énergie. Dire que l’activité économique provient du capital et du travail, c’est construire la science économique sur des notions purement verbales qui n’ont aucune réalité physique. Les trois grandes lois de la thermodynamique, le concept d’entropie et d’EROI devraient être maîtrisés par tous les économistes. La production économique, mesurée par le PIB, devrait être au premier ordre une fonction linéaire de la quantité d’énergie consommée.

-l’anthropologie : toute activité économique s’inscrit dans un contexte culturel fait de rituels, de valeurs et de croyances. A titre d’exemple, Max Weber a montré comment l’éthique protestante a influencé le capitalisme et Geert Hofstede  a détaillé comment l’éthique confucéenne explique en grande partie le décollage des pays du Sud-est asiatique et de la Chine. Dans son travail sur la pauvreté, Esther Duflo prend-elle en compte l’anthropologie et la façon dont les systèmes culturels et les représentations peuvent freiner le développement économique dans les pays pauvres ?

-la psychologie : les agents économiques sont  avant tout des êtres humains et leurs décisions économiques reposent en grande partie sur leur psychologie, elle-même influencée par leur anthropologie. En économie, la psychologie reste le plus souvent abordée par le biais de la rationalité des agents mais cette approche ne prend pas compte comment certains comportements perçus par l’économie classique comme « irrationnels » possèdent en réalité  une véritable rationalité comme l’a brillamment expliqué Nicholas Taleb.

En matière de psychologie, il est également important de s’intéresser aux biais cognitifs, à la neurobiologie et à la différence entre la psychologie de l’individu et celle des foules. L’éthologie et la psychologie évolutive apportent un éclairage important sur ce point.

-l’histoire : l’étude historique permet d’avoir une vue d’ensemble sur l’histoire économique, ses cycles ainsi que l’évolution des idées et des techniques. Par exemple, il est impossible de comprendre la réalité économique dans laquelle nous vivons sans comprendre l’histoire de la pensée occidentale ou celle de la révolution industrielle. De la même manière, pour comprendre l’économie japonaise et ses conglomérats, il faut remonter à l’histoire de la féodalité japonaise.

Une approche complète de l’économie fait  donc appel aussi bien à la physique et à ses modélisations mathématiques qu’à la biologie et aux sciences du vivant sans oublier bien sûr les sciences humaines et comportementales.  Malheureusement, il est aujourd’hui quasiment impossible  d’enseigner l’économie de cette façon. L’approche classique domine le monde universitaire et les futurs économistes, comme leurs professeurs, sont recrutés et sélectionnés en premier lieu  sur leurs compétences statistiques et mathématiques. Comme en psychologie et en sciences politiques, la solution réside dans l’émergence d’un système d’enseignement supérieur alternatif, solution qui pose néanmoins la question de la reconnaissance, de l’employabilité et du financement.

Aujourd’hui, la plupart économistes ressemblent à ces médecins du XVIIème siècle  moqués par Molière qui parlent en latin et prescrivent de savants remèdes sans comprendre les lois fondamentales de la médecine ou de l’anatomie humaine. Cette situation est d’autant plus ridicule que tous les concepts et les connaissances nécessaires à une compréhension réelle de l’économie sont là. Encore faut-il qu’ils puissent être expliqués et transmis.

De l’Antifragilité

Nassim Nicolas Taleb, auteur du « Cygne Noir », d’ »Antifragile » et de « Jouer sa peau » développait récemment sur Twitter son concept d’ « effet Lindy ».

Traduit de l’anglais par Stanislas Berton

« Vous voulez écrire un livre capable de survivre deux ou trois décennies ? Le premier réflexe est d’écrire quelque chose tourné vers le futur. Non. Assurez-vous que le contenu du livre est pertinent à la fois aujourd’hui mais aussi à un moment déterminé du passé, par exemple il y a 30 ans.

Inversement, si vous voulez qu’un livre meure, assurez-vous qu’il n’ait aucun intérêt pour un homme du passé.

Cette astuce s’applique aux institutions, aux idées, aux théories, aux technologies, et toutes ces autres choses non-périssables : la vieille technologie survit en grande partie parce qui est nouveau se trouve remplacé par ce qui est encore plus nouveau.

Le temps est à la fois un détecteur et une cause de fragilité : ce qui a survécu possède une résistance aux événements aléatoires.

Cette petite astuce nous permet de nous livrer à de la prédiction négative. L’Histoire n’a pas de sens ou plutôt, elle a un sens qui ne nous est pas accessible. En revanche, tout ce qui est fragile finira par rompre sous le poids du temps. Par conséquent l’effondrement est plus facile à prévoir que l’émergence : l’innovation est plus susceptible d’attaquer ce qui est nouveau et d’épargner ce qui est ancien.

En conséquence, certains éléments modernes seront remplacés- on ne sait pas encore par quoi, tout ce que l’on peut savoir est que ce qui est fragile s’effondrera  et que ce qui a été éprouvé par le passage du temps sera épargné. Voici donc une liste de choses nouvelles et fragiles qui sont susceptibles de disparaître au cours des dix prochaines années. Elles sont très modernes, hautement fragiles et soumises à des pressions donc attendez-vous qu’au moins quatre sur huit disparaissent :

Les huiles végétales (soja, maïs, palme), les statines et les médicaments psychotropes, la monnaie fiduciaire, le régime d’Arabie Saoudite, l’ordinateur de bureau, les compagnies aériennes nationales, le mouvement néo-athéiste, l’économie comportementale et le nudge, CNN, l’architecture non-fractale, les organisations centralisées et kafkaïennes comme Bruxelles ou Whitehall (UK), l’éducation d’ « élite »  au niveau licence, et pour terminer,  les organismes génétiquement modifiés»

A la liste de Taleb, j’ajouterai à titre personnel : l’idéologie égalitaire universaliste et la République Française, en tant que régime.

NB : Cet article ne fait pas partie du recueil l’Homme et la Cité

Des taux d’intérêts négatifs

Tout comme la mort de dieu prophétisée par Nietzsche, les taux d’intérêts négatifs sont un événement prodigieux qui n’a pas fait son chemin jusqu’aux oreilles des hommes.

Hors de la communauté financière, peu de gens comprennent la gravité et l’ampleur de ce qui est en train de se produire.

Les taux d’intérêt négatifs signifient  à terme la destruction du système financier et bancaire avec des conséquences incalculables sur la protection sociale, notamment les retraites et l’emploi.

Mais surtout,  les taux d’intérêts négatifs signifient  la destruction du concept même d’épargne.

Depuis l’émergence des systèmes économiques, il a toujours été bénéfique d’épargner, c’est-à-dire de différer la consommation pour pouvoir investir ou faire face à une période de creux.  Or, dans un contexte de taux négatifs, l’argent épargné est de l’argent dont la valeur diminue de jour en jour.

Dans un tel système, la préférence pour l’avenir n’a plus aucun sens. Sur le plan philosophique, les taux d’intérêts négatifs sont le symbole et l’aboutissement de notre époque  individualiste qui préfère la satisfaction égoïste du désir immédiat au fait de préparer l’avenir.

La vérité, c’est qu’avec les taux d’intérêts négatifs et les politiques «d’ajustements quantitatifs », l’argent n’a plus aucune valeur, c’est même l’ancien PDG du Crédit Suisse qui le dit.

Avec l’avènement de la monnaie fiduciaire, l’argent n’était plus qu’une convention mais aujourd’hui, même cette convention ne vaut plus rien.  Le système économique et financier est à l’agonie et toutes les politiques mises en œuvre ne sont plus que des soins palliatifs pour  prolonger cette dernière le plus longtemps possible.

Tôt ou tard, l’acharnement thérapeutique va  prendre fin et à ce moment, face à l’effondrement, la valeur ne  pourra que retourner à son refuge historique : l’or et l’argent.

Accrochez-vous au mât, ça va tanguer…

De la réussite

Discours prononcé en 2016 par Nassim Nicholas Taleb  lors de la cérémonie de remise des diplômes de l’Université de Beyrouth. Article original publié sur Medium.

Traduit de l’anglais par Stanislas Berton

Chers diplômés,

C’est la première cérémonie de remise de diplômes à laquelle j’assiste (je n’ai pas assisté à ma propre remise de diplôme). En plus, il faut que je trouve un moyen de vous parler de ce que réussir veut dire alors que je n’ai pas encore le sentiment d’avoir réussi et il ne s’agit pas là de fausse modestie.

Le succès en tant que construction fragile

Car j’ai une seule définition du succès : vous vous regardez dans le miroir tous les soirs et vous vous demandez si vous avez déçu la personne que vous étiez à 18 ans, juste avant l’âge où les gens commencent à être corrompus par la vie. Qu’il ou qu’elle soit le seul juge ; pas votre réputation, pas votre fortune, pas votre statut dans la communauté, pas les décorations accrochées à votre veste. Si vous ne vous sentez pas honteux, vous avez réussi. Toutes les autres définitions de la réussite ou du succès sont des constructions modernes, des constructions modernes et fragiles.

Pour les anciens grecs, la principale définition de la réussite était d’avoir une mort héroïque. Compte tenu du fait que, même au Liban, nous vivons dans un monde moins martial, nous pouvons par conséquent adapter notre définition de la réussite : avoir emprunté un chemin héroïque au profit du collectif, ce collectif étant défini aussi largement ou étroitement que vous le souhaitez.

Le plus important est que tout ne soit pas ramené à vous : les sociétés secrètes avaient une règle pour les uomo d’onore: vous accomplissez quelque chose pour vous et quelque chose pour les autres membres. Et la vertu est inséparable du courage. Comme le courage de faire quelque chose d’impopulaire. Prenez des risques pour les autres ; vous n’avez pas à le faire pour la terre entière, ça peut être simplement d’aider Beirut Madinati ou la municipalité locale.  Plus c’est à l’échelle micro, moins c’est abstrait, mieux c’est.

La réussite exige l’absence de fragilité. J’ai vu des milliardaires terrifiés par les journalistes, des gens fortunés qui se sentaient abattus parce que leur beau-frère était devenu riche, des universitaires avec des prix Nobel qui avaient peur de commentaires sur le net. Plus haut vous montez, plus dure est la chute. Pour presque  tous les gens que j’ai rencontrés, la réussite extérieure a été accompagnée par une fragilité accrue et une augmentation du sentiment d’insécurité. Les pires sont les “ex-quelque chose” avec des CV de 4 pages qui, après avoir quitté leur poste et être devenus accrocs à la considération de bureaucrates serviles, se trouvent mis au placard, comme si de retour chez vous, vous découvriez que quelqu’un avait  profité de votre absence pour vider votre maison de tous ses meubles.

Mais le respect de soi est robuste, c’est l’approche de l’école stoïque qui, au passage, était un mouvement phénicien (si quelqu’un demande qui sont les stoïques, je dirai que ce sont des bouddhistes avec un sale caractère, imaginez quelqu’un qui soit à la fois très libanais et très bouddhiste). Dans mon village d’Amioun, j’ai vu des gens robustes qui étaient fiers d’être des citoyens locaux impliqués dans la vie de leur tribu ; ils vont se coucher fiers et se réveillent heureux. Ou des mathématiciens russes qui, durant la période de transition post-soviétique, étaient fiers de gagner 200 dollars par mois et de faire un travail apprécié par vingt personnes et qui considéraient que montrer ses décorations ou accepter des récompenses était un signe de faiblesse et de manque de confiance dans la valeur de ses contributions. Et croyez-le ou non, certaines personnes fortunées sont robustes mais vous n’en entendez jamais parler parce qu’ils ne participent pas à la vie mondaine, vivent à côté de chez vous et boivent de l’Arak baladi et non de la Veuve Clicquot.

Histoire personnelle

Maintenant un peu de ma propre histoire.

Ne le répétez à personne mais si vous pensez que toutes mes idées proviennent d’une profonde réflexion philosophique sachez que tout cela n’est que du théâtre : cela vient d’un instinct de joueur qu’il est impossible d’éradiquer, imaginez un joueur compulsif jouant au grand prêtre. Les gens n’aiment pas le croire : toute mon éducation vient de mon expérience de trader et de preneur de risque avec un peu d’aide de l’école.

J’ai eu la chance d’avoir une formation plus proche d’un méditerranéen de l’antiquité ou d’un européen de l’époque médiévale que d’un citoyen moderne. En effet, je suis né dans une bibliothèque, mes parents avaient un compte à la Librairie Antoine à Bab ED Driss et une grande bibliothèque. Ils achetaient plus de livres qu’ils n’étaient capables de lire et ils étaient heureux que quelqu’un les lise à leur place. Mon père connaissait tous les érudits du Liban, en particulier les historiens. Par conséquent, nous avions souvent des prêtres jésuites à dîner et par leur érudition multidisciplinaire, ils étaient pour moi les seuls modèles de référence : mon idée de l’éducation était d’avoir des professeurs juste pour manger avec eux et leur poser des questions. C’est ainsi que j’en vins à valoriser l’érudition plutôt que l’intelligence et c’est d’ailleurs toujours le cas. Au départ, je voulais être un écrivain et un philosophe et pour cela, il faut lire des tonnes de livres, vous n’avez aucun avantage si votre connaissance est limitée au programme du Baccalauréat libanais. C’est comme cela  qu’à l’âge de 14 ans,  je me mis à sécher l’école la plupart du temps et à dévorer des livres. Plus tard, je découvris une incapacité à me concentrer sur les sujets que m’imposaient les autres. Je séparai l’école pour les diplômes et la lecture pour sa culture personnelle.

Qui j’étais à 20-22 ans. Pas un saint mais il voudrait que je sois aujourd’hui un saint pour l’absoudre de quelques péchés (véniels) qu’il a pu commettre.

Premier déclic

Jusqu’à l’âge de 23 ans, je dérivais un peu, sans objectif et restais bloqué à la page 8 du Grand Roman Libanais (mon roman avançait au rythme d’une page par an). Soudain, à Wharton, j’eus un déclic le jour où je découvris par accident la théorie des probabilités et devins complètement obsédé par le sujet. Mais, comme je l’ai dit, cela ne trouva pas son origine dans de hautes considérations philosophiques ou une soif de savoir scientifique, mais uniquement dans le frisson et la décharge hormonale que ressent celui qui prend un risque sur les marchés. Un ami m’avait parlé des produits dérivés financiers complexes et j’ai décidé de faire carrière dans ce domaine. C’était la combinaison du trading et de mathématiques complexes. Le sujet était nouveau et peu exploré. Mais très très difficile sur le plan mathématique.

L’avidité et la peur sont des professeurs. J’étais comme ces drogués qui ont une intelligence inférieure à la moyenne mais qui sont capables des astuces les plus ingénieuses pour se procurer leur drogue. Quand il s’agissait de risque, un second cerveau se manifestait et tous ces théorèmes devenaient intéressants. Quand il y a le feu, vous courrez plus vite que dans n’importe quel championnat. Et quand la situation redevenait calme, je redevenais stupide.

De plus, en tant que trader, les mathématiques que nous utilisions allaient comme un gant à nos problèmes contrairement aux universitaires qui ont des théories à la recherche d’une application. Appliquer des maths à des problèmes pratiques était une tout autre affaire ; cela supposait une compréhension profonde des problèmes avant de mettre des équations dessus. C’est ainsi que je trouvais qu’obtenir un doctorat après 12 ans dans la finance était bien plus facile que d’obtenir des diplômes d’un niveau moindre.

En chemin, je découvris que les économistes et les experts en sciences sociales utilisaient toujours des mathématiques inadaptées à leurs problèmes, ce qui devint plus tard le thème du Cygne Noir. Ce n’est pas juste que leurs outils statistiques étaient faux, ils étaient outrageusement faux et ils le sont toujours. Leurs méthodes sous-estimaient les « événements de queue » (tail events), ces sauts rares mais lourds de conséquences. Ils étaient trop arrogants pour l’accepter. Cette découverte me permit de devenir financièrement indépendant dans ma vingtaine après le krach de 1987.

Je pensais donc que j’avais quelque chose à dire sur la façon dont nous utilisons les probabilités et la façon dont nous considérons et gérons l’incertitude. Les probabilités sont la logique de la science et de la philosophie ; elle concerne de nombreux sujets : la théologie, la philosophie, la psychologie, la science et de façon plus banale, la gestion des risques, au passage, les probabilités sont nées au Levant au 8ème siècle en tant que 3elm el musadafat et utilisées pour décrypter des messages.

Les trente dernières années ont été pour moi une flânerie à travers les sujets, embêtant les gens au passage, jouant des tours aux types qui se prennent au sérieux. Vous prenez un papier de recherche médical et demandez à un scientifique imbu de lui-même comment il interprète la valeur p- ; l’auteur va être terrorisé.

L’association internationale des name-droppers

Mon second déclic eut lieu lors de la crise de 2008 qui confirma mes dires et me fit gagner une belle somme d’argent en risquant une fois de plus ma peau. Mais la célébrité vint avec la crise et je découvris que je détestais la célébrité, les gens célèbres, le caviar, le champagne, la nourriture compliquée, le vin cher et surtout les experts en œnologie.

J’aime les mezzés avec un Arak baladi local et du calamar dans son encre  (sabbidej), pas plus, pas moins et  les gens riches ont tendance à avoir leurs préférences dictées par un système conçu pour les plumer. Mes propres préférences me furent révélées quand, après un dîner dans un restaurant trois étoiles au Michelin avec des gens ennuyeux et coincés, je m’arrêtai à la pizzeria de Nick pour un plat à 6,95 dollars et depuis je n’ai plus jamais pris un repas Michelin ou quoi que ce soit avec un nom compliqué.

Je suis particulièrement allergique aux gens qui aiment être entourés de gens célèbres, l’AIND (l’association internationale des name-droppers). Après un an sous les feux de la rampe, je retournai à mon isolement dans ma bibliothèque (à Amioun ou près de New-York) et commençai une carrière de chercheur travaillant sur des sujets techniques. Quand je lis ma biographie, j’ai toujours le sentiment qu’il s’agit de celle d’une autre personne : elle décrit ce que j’ai fait pas ce que je suis en train de faire ou ce que j’aimerais faire.

Au sujet des conseils et du fait de jouer  sa peau

Je ne fais que décrire ma vie. J’hésite à donner des conseils car tous les conseils importants que j’ai reçus se sont révélés faux et je suis heureux de ne pas les avoir suivis. On m’a dit de me concentrer sur un sujet et je ne l’ai jamais fait. On m’a dit de ne jamais faire traîner les choses, j’ai attendu vingt ans pour le Cygne Noir et j’en ai vendu trois millions d’exemplaires. On m’a dit d’éviter de mettre des personnages fictifs dans mes livres et j’ai créé Nero Tulip et Fat Tony car autrement je m’ennuyais. On m’a dit de ne jamais insulter le New York Times et le Wall Street Journal ; plus je les insultais, plus ils étaient sympathiques avec moi et me demandaient d’écrire des éditos. On m’a dit d’éviter de soulever des poids à cause d’un problème de dos et je me suis mis à soulever des poids, je n’ai plus eu un problème de dos depuis.

Si je devais refaire ma vie, je serai encore plus têtu que je ne l’ai été et je ferai encore moins de compromis que ceux que j’ai fait.

Personne ne devrait jamais rien faire sans jouer sa peau. Si vous donnez un conseil, vous devez être exposé aux pertes qu’il peut occasionner. C’est une extension de la règle d’argent. Je vais vous donner toutes les astuces que j’utilise.

  • Ne lisez pas les journaux ou ne suivez pas les actualités d’une quelconque façon ou manière. Pour en être convaincu, lisez les journaux de l’année dernière. Cela ne veut pas dire qu’il faut ignorer l’actualité, cela veut dire que vous partez de l’événement pour aller à l’actualité et non le contraire
  • Si quelque chose est bidon, dites-le et dites le fort. Cela vous fera un peu de mal mais vous serez antifragile et sur le long terme, les gens qui ont besoin de vous faire confiance vous feront confiance.

Quand je n’étais encore qu’un obscur auteur, j’ai quitté le studio de la radio Bloomberg pendant une interview parce que le journaliste racontait n’importe quoi. Trois ans plus tard, Bloomberg fit sa couverture sur moi. Tous les économistes de la planète me détestent (sauf ceux de l’université américaine de Beyruth bien sûr)

J’ai dû faire face à des campagnes de diffamation et encouragé par le Libanais le plus courageux depuis Hannibal, Ralph Nader, j’ai mis ma réputation en danger en mettant en évidence les infâmes malversations d’entreprises comme Monsanto et le prix à payer fut une campagne de diffamation menée contre moi.

  • Traitez le portier avec un peu plus de respect que le grand patron
  • Si quelque chose vous ennuie, évitez-le, à l’exception des impôts et des visites à votre belle-mère. Pourquoi ? Parce que la biologie est le meilleur outil qui soit pour détecter ce qui est bidon, utilisez-le pour mener votre vie.

A éviter à tout prix

Il y a beaucoup de règles de ce genre dans mes livres alors pour le moment, laissez-moi terminer avec quelques maximes. Celles qui suivent sont des choses à éviter à tout prix :

Des muscles sans force

De l’amitié sans confiance

Des opinions sans risque

Du changement sans esthétique

De l’âge sans valeurs

De la nourriture sans être nourri

Du pouvoir sans justice

Des faits sans rigueur

Des diplômes sans érudition

Du militarisme sans force morale

Du progrès sans civilisation

De la complexité sans profondeur

De la maitrise sans substance  

Et surtout, de la religion sans tolérance.

Merci.

De la diversité

« Défiez-vous, disait-il, de ces cosmopolites qui vont chercher loin de leur pays des devoirs qu’ils dédaignent accomplir chez eux. Tel philosophe aime les Tartares pour être dispensé d’aimer ses voisins. » Jean Jacques Rousseau

« La diversité est une chance », « La diversité est une force ».

Cette affirmation est devenue un lieu commun du discours politique qui, à force d’être répétée, a fini par s’imposer comme une vérité.

Pourtant, cette affirmation ne repose sur aucune base réelle.

Elle est un dogme, un article de foi dont la fausseté a été démontrée à plusieurs reprises par l’analyse scientifique.

En 2007,  le professeur Robert Putnam, sociologue à Harvard, de surcroît marqué à gauche, a démontré dans une série de brillantes études consacrées au délitement du lien social que  l’augmentation de la diversité entraînait la diminution de la confiance et du lien social au sein des communautés.

Plus récemment, une meta-analyse menée à partir de 87 études par des chercheurs danois de l’université de Copenhague et d’Aarhus a confirmé que la diversité ethnique impactait de façon négative la confiance au sein des groupes.

Dans le même registre  le sociologue finlandais Tatu Vanhanen a démontré  en 1999 comment le multiculturalisme était facteur de multiconflictualité à cause notamment de ce qu’il a appelé le « népotisme ethnique ».

La diversité n’est donc pas une force.

C’est un facteur de destruction des communautés naturelles et ceux qui continuent de la promouvoir témoignent soit d’une profonde ignorance, soit d’une volonté délibérée d’engendrer le chaos.

Dans tous les cas, il est grand temps que la diversité cesse d’être présentée comme un souverain bien et que ceux qui défendent publiquement cette idée soient considérés comme des charlatans et des imposteurs.

De la chasteté féminine

Article publié le 12 février 2024 par Vox Day sous le titre original « Frisky Barbie vs Chaste Babe – how men value women in the sexual and marital markets ». Traduit de l’anglais par Stanislas Berton.

Cet article a été écrit en 2010 en réponse à un article publié sur un blog féminin aujourd’hui disparu mais il demeure aussi pertinent qu’il l’était à l’époque. Il offre également un outil permettant de prévoir le comportement féminin plus fiable que toutes les diverses formes féminines du SSH (hiérarchie socio-sexuelle) proposées jusqu’à présent.

Un certain nombre de personnes n’ont cessé de me demander s’il existait un équivalent féminin de la hiérarchie socio-sexuelle masculine alpha-omega. J’ai commencé par répondre de façon assez malicieuse qu’il existait une échelle de 1à 10 parfaitement utile qui ne demandait pas d’effort mental particulier pour être comprise mais il va de soi que l’évaluation socio-sexuelle d’une femme ne dépend pas seulement de sa beauté physique à un moment donné. Cependant, ce n’est qu’après la lecture de l’article The Sex Risk for Women That No One Likes to Talk About que j’ai compris comment fonctionnait la hiérarchie féminine.

« Comme le dit Davis Buss, le contexte dans lequel se rencontrent les couples a beaucoup changé mais les êtres humains ont toujours recours aux mêmes stratégies sexuelles. Sur les soixante sept caractéristiques que les hommes recherchent pour une relation à long terme, la fidélité et la loyauté sexuelle sont considérées comme les plus importantes, quelle que soit la culture étudiée. Si les hommes recherchent des femmes « libérées », expérimentées et sexuellement très actives pour des relations de court-terme, en ce qui concerne leur futur femme leurs choix se portent de préférence sur une femme sans expérience ou, a minima, moins sexuellement expérimentée qu’eux.

Dans la culture actuelle du «coup d’un soir», ce problème se trouve exacerbé par le fait que le nombre de femmes sans expérience sexuelle a drastiquement diminué. Une des choses que j’entends le plus de la part d’hommes comme M.Indécis [personnage dont l’histoire est racontée dans l’article cité] est qu’ils ne veulent pas d’une femme sur laquelle d’autres hommes seraient « passés ». Ils considèrent de façon évidente cela comme une insulte à leur fierté et beaucoup d’entre eux refuseront de se marier s’ils ne parviennent à trouver une femme qui satisfasse leurs exigences. »

Nous savions déjà que les hommes accordent une grande valeur à la beauté féminine, or si nous prenons en compte le fait que la loyauté sexuelle est également très importante à leurs yeux et que l’historique des relations sexuelles d’une femme offre un moyen empirique d’évaluer cette loyauté sexuelle, par définition difficile à estimer, il est alors possible de construire une échelle capable de décrire de façon fiable l’attractivité socio-sexuelle d’une femme pour les hommes.

Selon le CDC américain [Center for Disease Control), lorsqu’elles sont interrogées de façon anonyme, les femmes entre 20 et 59 ans définissent l’historique de leurs relations sexuelles de la manière suivante :

HISTORIQUE

  • Salope: 15 partenaires et plus: 9.4%
  • Délurée: 7 à 14 partenaires: 21.3 %
  • Normale: 2 à 6 partenaires: 44.3 %
  • Chaste: 0 à 1 partenaires: 25 %

Toujours d’après le CDC, le nombre médian de partenaires sexuels pour une femme qui a atteint ce qui est aujourd’hui devenu l’âge normal du mariage (25-29 ans) est de quatre. Ce rapport montre également que l’historique des relations sexuelles constitue une variable adéquate pour prédire le statut marital futur: 30,8 % des femmes chastes sont mariées et 6,5 % sont divorcées tandis que 7,4 % des femmes « salopes » sont mariées et 19,1 % sont divorcées.

Note de 2024 : le fait qu’une femme « chaste » ait 41 % de chances en plus de se marier qu’une « salope » suggère fortement, sans le prouver, que ses chances de se marier à un homme de statut plus élevé sont également plus hautes, notamment en tenant compte ce qui devrait être une observation évidente, à savoir que ses standards et ses attentes ont plus de chance d’être plus élevés que plus bas.

Pour rester simple, je vais diviser les femmes en quatre catégories en fonction de leur beauté physique évaluée sur une échelle de 1 à 10 :

BEAUTÉ :

  • Barbie: 9-10: 2.5 %
  • Beauté: 7-8: 12.5 %
  • Jeanne: 4-6: 55 %
  • Coyote: 1-3: 30 %

La chose la plus importante à garder à l’esprit est que les hommes ont une approche très binaire des femmes. Ce qu’ils recherchent à court-terme n’est jamais ce qui est prioritaire pour eux à long terme. Pour une relation permanente, ce qui correspond à ce que j’imagine que les lecteurs de cet article recherchent, la plupart des hommes sont prêts à descendre d’un niveau sur l’échelle de la beauté pour en gagner un sur l’échelle de la chasteté, à l’exception peut-être des Alphas et des Sigmas qui placent un premium sur la beauté, probablement parce que la différence entre normale, délurée et salope n’est qu’un arrondi dans la longue liste de leurs conquêtes sexuelles, même s’il n’est jamais possible de prévoir la préférence d’un individu à l’échelle micro à partir de la moyenne macro.

Les cinq catégories féminines

  • Catégorie 1: Barbie chaste, Barbie normale, Beauté chaste
  • Catégorie 2 :Barbie délurée, Beauté normale, Jeanne chaste
  • Catégorie 3: Barbie salope, Beauté délurée, Jeanne normale
  • Catégorie 4: Beauté salope, Jeanne délurée, Coyote chaste
  • Catégorie 5: Jeanne salope, coyotes normaux, délurés et salopes

Cela explique la réaction négative de M. Indécis au récit de sa petite amie ainsi que la combinaison « femme sexy+mari qui ne ressemble à rien » qui n’a jamais cessé de rendre perplexes tant d’observateurs des relations humaines, quel que soit leur sexe.

M. Indécis croyait avoir conquis une Beauté normale mais celle-ci s’est révélée être une Beauté salope. La perception de la valeur de sa future femme a donc diminué en conséquence, au point où M. Indécis considère désormais mettre fin à la relation et refusera très probablement de l’épouser. Dans le cas de « femme sexy+mari qui ne ressemble à rien », il s’agit vraisemblablement d’un cas de femme dont la valeur « Beauté » a été réduite par son score « Chasteté », résultat conduisant à la faire descendre dans une catégorie plus basse.

Bien évidemment, il s’agit là de de règles générales fondées sur des statistiques auxquelles il peut toujours y avoir des exceptions individuelles. Mais cela explique pourquoi les stars du porno les plus sexys n’épousent que rarement des Alphas et pourquoi des femmes, proportionnellement moins séduisantes parviennent à épouser des hommes considérés comme très désirables comme Pierce Brosnan ou Denzel Washington.

Cela montre également le choix clair que les jeunes femmes doivent faire entre leurs instincts hypergamiques à court-terme et leurs perspectives de mariage à long terme. Et, selon moi, un des aspects les plus intéressants de tout ceci est la façon dont les femmes tendent à partager cette vision hiérarchique de leur propre sexe avec les autres hommes, tandis que les hommes considèrent souvent avec mépris l’Alpha bonimenteur et n’arrivent pas à comprendre pourquoi les femmes sont autant attirées par lui.

Note du traducteur

Une fois de plus, la science moderne ne fait que redécouvrir ce que la morale traditionnelle, renforcée et légitimée par la religion, avait compris de façon empirique, à savoir que la chasteté est une chose qui doit être préservée par la femme et valorisée par la société. À l’inverse, la libération sexuelle, opération d’ingénierie sociale mondialiste, participe de cette guerre hors-limite menée contre les peuples en contribuant notamment à la misère sexuelle, à la destruction de la famille et à l’effondrement de la natalité.

Pour aller plus loin :

Hiérarchie socio-sexuelle (SSH-Vox Day)

De la hiérarchie socio-sexuelle (Berton)

Sigma game (blog Vox Day)

De la libération sexuelle

De la guerre hors limite (Berton)

Femme à part (blog modestie chrétienne et féminité)