Article de Martin Geddes publié le 11 janvier 2024 sur Substack sous le titre original « The last raspberry from Tesco ». Traduit de l’anglais par Stanislas Berton.
Si j’habitais en Ukraine, j’aurais sans doute des préoccupations plus importantes que l’accès hors-saison à des fruits rouges périssables. Mais ceci dit, si j’habitais en Ukraine, il serait plus facile pour moi de « vendre » à ma famille et à mes voisins que le monde se trouve en plein milieu d’une guerre conventionnelle et non-conventionnelle. Une des expériences les plus étranges de l’époque actuelle est de refermer l’ordinateur qui se trouve sur mon bureau, après des heures passées à travailler sur la poussière intelligente et les IA rebelles, pour ensuite me rendre au supermarché afin de remplir le frigo. J’aime accompagner mon petit déjeuner de framboises et de myrtilles, et étant quelqu’un de très attaché à ses petites habitudes, je n’aime pas tout ce qui peut venir perturber ma routine.
Les soldats de la Première Guerre mondiale pouvaient détecter la fumée jaune et l’odeur chimique d’une attaque et crier « Gaz ! Gaz ! » pour être ensuite considérés comme des héros. Durant la pandémie de Covid, nous avons à juste titre crié « Arme génétique et bactériologique ! Arme génétique et bactériologique ! » avec comme seul résultat de nous retrouver moqués, exclus et aliénés. Plus vous avez conscience des armes invisibles de cette guerre silencieuse, plus vous semblez fou à ceux qui en sont les victimes. La vie devient un numéro d’équilibriste entre deux réalités très distinctes : dans l’une, des armes exotiques prennent le contrôle de toute vie biologique pour en réécrire la définition ; dans l’autre, vous devez trouver une pièce pour votre voiture sur Ebay car le modèle est trop vieux pour qu’elle soit encore en stock. Il existe une friction permanente entre l’extrême et l’ordinaire qui ne cesse jamais.
Ce grand écart permanent finit par impacter votre santé mentale. Ceux qui font partie de la communauté du renseignement ont des taux très élevés d’alcoolisme, d’addiction sexuelle ou de divorce car ils utilisent des façons peu saines de faire diminuer le stress causé par le fait que leur travail clandestin leur impose une double vie. D’autres se mettent à écrire des romans car c’est pour eux la seule façon de dire la vérité. Pour le reste d’entre nous, la partie difficile à gérer est que nous pouvons crier les « secrets » sur tous les toits aussi forts que nous le voulons, peu de personnes sont prêtes à nous écouter. Nous devons admettre que nous sommes cernés par toutes sortes de menaces invisibles et nous devons trouver des mécanismes compensatoires nous permettant de « devenir fous afin de rester sains d’esprit ». Être conscient des dangers de la vie ordinaire sans pour autant vivre dans la paranoïa demande un effort constant.
Le supermarché lui-même a des rayons entiers de produits toxiques auxquels je ne touche pas et malgré cela, il faut tout de même trouver le moyen de se nourrir avec ce qu’il reste. Suite au Covid, je vis dans la peur, tout à fait raisonnable, qu’une nouvelle salve de confinements arrive sans prévenir, qu’un krach financier ferme les commerces ou plus généralement que la société soit confrontée à une situation de « rupture de normalité ». Tout ceci s’est transformé en obsession de ne pas être pris au dépourvu. Je ne peux pas supporter de voir mon frigo se vider. On y trouve toujours beaucoup de lait, souvent au-delà de la date de péremption. Les étagères du bas sont remplis de fromage. Et j’achète souvent bien plus de viande que ce dont j’ai vraiment besoin. Dans le cadre de cette violence psychologique auto-infligée, l’idée que je ne puisse pas avoir mes framboises au petit déjeuner est devenu une sorte de totem représentant l’illusion du contrôle dans un contexte hors de tout contrôle.
Un membre masculin de ma famille a grandi dans un foyer avec un père vétéran souffrant de stress post-traumatique, tout en ayant perdu sa mère quand il était adolescent. À un moment de sa vie, il s’est mis à acheter de façon compulsive des CD de musique classique et des chemises en promotion en guise de réponse à un traumatisme non guéri. L’attaque psychologique de nature militaire menée contre nous en 2020-2021 a également des répercussions sur notre santé dont les effets sont exacerbés par le nombre de nos proches aspirés par la folie collective et qui, s’ils en sont toujours prisonniers, sont devenus pour nous des étrangers. Je scrute mes propres réactions aux blessures invisibles de cette guerre furtive. Par exemple, je ne peux pas laisser le réservoir de ma voiture à moitié vide et je m’assure d’avoir toujours fait le plein, même pour des petits trajets.
Il est assez évident que de profonds bouleversements sont en cours. Les gouvernements qui nous ont trahi seront renversés, les criminels qui nous ont blessés devront rendre des comptes et de nouveau systèmes d’argent, d’énergie et de médecine remplaceront ceux qui ont échoué. Tout cela se déroule selon une chronologie sur laquelle je n’exerce aucun contrôle et sur laquelle je n’ai aucune visibilité. Jusqu’à ce que le dernier coup de sifflet retentisse et que le marathon soit terminé, chaque jour fait office de véritable test d’endurance visant à surmonter « le poison de la patience ». Des décisions de la vie de tous les jours, comme faire ou non de longs trajets pour aller voir des amis, deviennent, dans le cadre de cette guerre furtive, de grandes opérations logistiques. Comme une femme battue, vous êtes toujours à l’affût de la prochaine « main levée » dans votre environnement pour anticiper le coup.
La tentation est de chercher des réponses matérielles à un problème de nature spirituelle. Mon vice personnel est d’essayer de deviner le timing du « grand événement » de façon à pouvoir fièrement m’emparer de la « dernière framboise de chez Tesco » [grande chaîne de supermarché anglaise] avant la fin du monde. Je sais bien que ce n’est pas rationnel. Je n’ai pas réellement besoin d’un fruit qui commence à pourrir quelques secondes après que je sois arrivé à la maison. Ces préoccupations sont des dadas ou des petites manies qui permettent à notre attention de se détourner des véritables horreurs auxquelles nous sommes quotidiennement confrontés : des armes à énergie intégrées au mobilier urbain, des rayons de la mort venus du ciel et au-delà, des nanorobots injectés dans nos corps, des cochonneries pulvérisées dans les nuages et des choses bien pires encore. Nous avons été témoins de la corruption de la science mais nous n’avons pas encore vu les moyens de la juguler.
La nécessité de faire des réserves est une réaction instinctive face au risque d’effondrement économique, voire de famine. Toute réaction à ce risque, quelle soit celle du survivaliste forcené ou du parasite fantasque, peut se trouver justifiée selon le choix sélectif du scénario envisagé. J’ai appris que se préparer à un changement non conventionnel et imprévu est davantage une question de préparation mentale ou spirituelle que matérielle. Si une alarme annonçant une Troisième Guerre mondiale nucléaire se mettait à retentir, ma première réaction serait de sourire à cette mère de toutes les psy-ops que serait l’injonction à « rentrer chez vous pour votre propre sécurité ». Je n’aurais même pas besoin de courir pour rentrer chez moi avec mon stock de framboises fraîches et juteuses, achetées idéalement quelques instants avant que les sirènes se taisent et que les caisses ne soient fermées.
Mon « besoin » de sur-remplir mon frigo me sert généralement à camoufler un autre type de problème émotionnel. Je peux être en train de faire le deuil d’une relation perdue, d’être préoccupé par un problème de santé ou d’être stressé par une interaction non désirée avec un membre de l’administration. J’ai accepté il y a longtemps que si le prix à payer pour un sentiment de stabilité intérieure était de gâcher un peu de nourriture, cela n’était pas si grave. Personne n’a jamais essayé auparavant de combattre au sein d’une alliance civile et militaire durant une guerre bio-informationnelle. Chacun d’entre nous doit développer ses propres techniques de survie mentale afin de préserver notre capacité à gérer un flux, en apparence infini, d’injustices et d’incertitudes.
Ma propre quête pour m’emparer de la « dernière framboise de chez Tesco » (avant la fin de la civilisation telle que nous la connaissons) m’apparaît comme plutôt cocasse que chaotique, folle ou dysfonctionnelle. Peut-être ferons-nous l’expérience d’un atterrissage en douceur et de telles catastrophes ne se produiront pas ; ou nous connaîtrons un nouveau Déluge et mes compétences de devin et de chasseur-cueilleur de produits frais se trouveront justement récompensées. Mes précieuses framboises symbolisent la vie dans cette guerre totalement folle pour libérer l’humanité des chaînes de l’esclavage : douces au palais si nous les manipulons avec précaution mais facilement abîmées si nous n’en prenons pas soin.
Chacun a sans doute sa façon unique de gérer le stress de ces derniers jours d’attente de la fin de la l’ancien monde. Nous sentons intuitivement qu’un grand changement arrive et qu’il affectera tout ce que nous connaissons. Des nombreux indices ont été communiqués pour nous préparer mentalement à cet événement, sans pour autant dévoiler le timing opérationnel. Nous avons le profond désir de nous réconcilier avec ceux dont nous avons été séparés, de voir ceux qui nous ont nui rendre des comptes et de trouver la paix grâce à la reconnaissance de notre prescience. En attendant, il y a des petits plaisirs qui nous aident à tenir bon. Le mien étant les framboises bien mûres de chez Tesco.
Pour aller plus loin:
De la guerre invisible (Martin Geddes)
Des bonnes questions (Martin Geddes)
Largement inconnu en France, Martin Geddes, auteur de plusieurs livres, de dizaines d’essais et d’un travail colossal de réinformation sur les réseaux sociaux, est un des acteurs majeurs du Grand Réveil. Tous les écrits de Martin Geddes, libres de droits et en accès libre, peuvent être consultés ici.