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Du catholicisme “blanc”

Extraits de l’article original d’E. M. Jones publié le 10 mars 2025 sous le titre « Guns and rosaries : The rise of white catholicism ». Traduit de l’anglais par Stanislas Berton.

En 2007, j’ai publié L’esprit juif révolutionnaire pour détacher la question juive de la question raciale de « l’antisémitisme » et replacer la discussion là où elle avait commencé, au pied de la Croix, et en tant que sujet d’ordre religieux. Ce livre a permis de lancer un débat sur la question juive qui se poursuit encore aujourd’hui et dont j’assume la paternité. A mon grand regret, cette discussion s’est transformée de façon inattendue en une glorification de la vision raciale que j’avais contestée. La question juive abordée sous l’angle théologique est devenue la question juive abordée sous l’angle racial des nazis. La discussion théologique dont j’avais posé les bases s’est faite pirater par un groupe de gens déterminés à faire replonger la question juive dans le marais d’où je l’avais extraite. Je veux parler des racistes en général et des défenseurs des nazis en particulier. Ils se manifestèrent après la publication de mon livre The Holocaust Narrative en affirmant que 1) Hitler était le seul homme dans l’histoire qui avait traité la question juive de manière efficace 2) il n’avait pu le faire qu’en plaçant l’Église catholique sous le contrôle de l’État, ce qu’il n’avait pu réaliser qu’en arrêtant des prêtres catholiques et en les enfermant à Dachau. Dans un discours désormais disponible sur Odyssée, Hitler déclare :

« Ce n’est pas la compassion ou la pitié pour les serviteurs persécutés de Dieu qui a attiré l’attention de citoyens démocratiques envers des prêtres allemands qui sont entrés en conflit avec la loi. Ils ne s’intéressent à eux qu’en tant qu’ennemis de l’État. Sur ce sujet, qu’ils prennent note de la chose suivante : nous protégerons le prêtre allemand en tant que serviteur de Dieu, mais nous détruirons le prêtre allemand qui est un ennemi politique du Reich allemand. »

Dans la version allemande originale du texte, Hitler utilise le terme « vernichten » qui signifie « exterminer ». Hitler a clairement déclaré qu’il allait « exterminer » tout prêtre qui s’engagerait dans ce qu’il appelait une activité « politique ». Comme le souligna le pape Pie XI dans l’encyclique Mit Brennender Sorge, la première encyclique de l’histoire de l’Église catholique à aborder le phénomène relativement nouveau du racisme, Hitler ignorait les termes du Concordat qu’il avait signé avec l’Église catholique. Ce Concordat garantissait aux prêtres catholiques le droit de prêcher l’Évangile comme ils l’entendaient. En vérité et pour tout ce qui concernait la loyauté des prêtres catholiques envers le IIIe Reich, Hitler et ses hommes de main étaient à la fois les juges, les jurés et les bourreaux. C’est pour cette raison que beaucoup de prêtres furent envoyés à Dachau et y moururent.

« L’arbre de la paix, que nous avons planté en terre allemande avec les intentions les plus pures, n’a pas porté les fruits favorables à votre peuple », parce que le IIIe Reich a négocié de mauvaise foi et s’est livré à des « intrigues qui, dès le départ, ne visaient qu’une guerre d’extermination. Dans les sillons où Nous avions essayé de semer la graine d’une paix sincère, d’autres hommes – cet « ennemi » dont parle l’Écriture sainte – ont resemé l’ivraie de la méfiance, de l’agitation, de la haine, de la calomnie, d’une hostilité résolue, tantôt ouverte et tantôt voilée, alimentée par de multiples sources et utilisant de multiples instruments contre le Christ et son Église. » Le IIIe Reich, « lui seul et ses complices, silencieux ou bruyants, porte la responsabilité si, au lieu de l’arc-en-ciel de la paix, c’est l’orage d’une guerre religieuse qui obscurcit aujourd’hui le ciel allemand. »

Malgré la bonne foi du Saint-Siège, « animée par la force contraignante des traités », les nazis « ont vidé les termes du Concordat de leur contenu, en ont dénaturé le sens et sont finalement arrivés à tenir pour une politique normale la violation plus ou moins officielle du concordat lui-même ». Malgré la campagne menée contre les écoles confessionnelles – garanties par le concordat – et la suppression du libre choix par lequel les catholiques ont le droit d’assurer à leurs enfants une éducation catholique, campagne qui constitue « un témoignage, dans un domaine aussi essentiel à la vie de l’Église, de la gravité extrême de la situation et de l’angoisse de toute conscience chrétienne », le Saint-Siège était prêt à « un retour à la fidélité aux traités et à tout arrangement qui pourrait être accepté par l’épiscopat », mais il continuerait à s’opposer « à la politique qui, par des moyens ouverts ou occultes, tend à étouffer des droits garantis par un traité ».

Les néo-nazis et les théoriciens racialistes qui ont attaqué The Holocaust Narrative ont ignoré à la fois les efforts du Vatican pour arriver à un modus vivendi et la détermination des nazis à ne jamais y parvenir. Ils ont ignoré la persécution hitlérienne de l’Église catholique et ont embrassé son idéologie raciale dans une réaction perverse à la culture médiatique juive américaine qui, pendant si longtemps, l’avait diabolisé comme l’incarnation même du mal. La réaction au succès de la propagande de la Seconde Guerre mondiale, combinée à la liberté nouvellement acquise d’examiner la « question juive » que mon livre avait rendue possible, a déclenché un débat sur la race et le rôle qu’elle jouait dans l’identité américaine. Après avoir tweeté le lien d’une vidéo expliquant comment les Italiens étaient devenus « blancs », j’ai obtenu près d’un demi-million de vues en moins de 24 heures, et la plupart des commentaires me vilipendaient en me traitant de boomer, de traître à la race, etc. L’une des réponses les plus sensées posait une série de questions :

« 1) Les Américains blancs et les Américains noirs appartiennent-ils à la même race ou à des races différentes ? 2) Existe-t-il des écarts raciaux en matière de capacités cognitives (QI, scores SAT, moyennes scolaires) entre les Noirs et les Blancs aux États-Unis ? 3) Les Noirs commettent-ils, par habitant, plus d’actes de violence et/ou plus de viols et de meurtres ? Cette violence est-elle ancrée dans la nature (génétique) ou dans l’éducation/l’environnement (culture) ? »

Ces questions touchaient au cœur de la manipulation qui se cache derrière toute discussion sur la race dans l’Amérique contemporaine. Le terme rhétorique pour « manipulation» est l’équivoque. Toute cette discussion tourne autour d’un usage équivoque du mot « race ». Si vous ne comprenez pas l’équivoque, vous ne comprendrez pas le tour de bonneteau connu sous le nom de « blanchité » . « Être équivoque » signifie employer un langage ambigu ou peu clair pour induire les gens en erreur. Par exemple : « Quand on lui a demandé directement sa position sur le désarmement, le candidat a été équivoque. » Utiliser le même mot avec deux sens différents pour manipuler est une caractéristique fondamentale du récit racial.

Nous devons comprendre cela avant de pouvoir répondre à la question n° 1. « Race » peut signifier ethnie, sens dans lequel il était très souvent employé à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Quand Mgr O’Connell disait à l’évêque John Ireland qu’il ne fallait pas présenter le conflit sur les titularisations à l’Université catholique comme une « question raciale », il faisait référence à un affrontement entre catholiques irlandais et catholiques allemands. Il ne parlait pas de Blancs ou de Noirs. L’emploi de ce terme a évolué au cours du XXe siècle et en est venu à désigner le phénotype. Ce sens-là ne pouvait pas s’appliquer au conflit de titularisation à l’Université catholique, puisque les deux groupes étaient phénotypiquement identiques.

Dans la question n° 1, le mot « race » est employé de manière descriptive pour distinguer l’apparence des personnes nées en Afrique de celle des personnes nées en Europe. Les différences sont évidentes. Elles constituent ce que j’appellerais une catégorie de la réalité. Une fois que j’ai accepté ces différences d’apparence, on me demande ensuite d’accepter la race comme une catégorie normative de l’esprit ou comme un impératif moral qui affirme désormais qu’une « race », c’est-à-dire un phénotype, est bonne et que l’autre est mauvaise. Les théoriciens de la race critique comme Noel Ignatiev disent que le blanc est mauvais, rejoignant ainsi sur le principe le Ku Klux Klan qui affirme que le blanc est bon et que le noir est mauvais. Les racistes bien élevés ne le disent plus ouvertement, bien que ce soit exactement ce qu’ils pensent. Ils utilisent plutôt des termes comme l’intelligence et passent aux discussions sur les tests de QI standardisés afin d’introduire subrepticement des jugements de valeur dans ce qui avait commencé par mon acceptation de caractéristiques physiques ou de phénotypes.

C’est précisément ce qui s’est produit lors du passage de la question n° 1 à la question n° 2. Une fois que j’ai accepté la réalité du phénotype, on attend de moi que j’accepte non seulement la validité des tests d’intelligence standardisés, mais aussi l’affirmation que les résultats de ces tests sont déterminés par un substrat biologique que tous les membres de ce phénotype partageraient. Si je m’y refuse, ou si je prétends que des facteurs environnementaux comme la structure familiale peuvent avoir un lien avec les résultats des tests, on m’accuse de nier la science – de la même manière que l’on accusait ceux qui refusaient d’être « vaccinés » pendant la crise du COVID.

Cette équivoque conduit ensuite à des affirmations absurdes comme « Le QI moyen des Haïtiens est de 75 », ce qui me conduit à demander quand un test de QI a été administré pour la dernière fois en Haïti et dans quelle langue. Existe-t-il un test de QI en créole haïtien ? Pour ceux qui veulent comprendre l’histoire des tests standardisés et les biais qui les sous-tendent, je recommande le livre de Nicholas Lemann The Big Test, qui, entre autres choses, explique comment les Juifs ont triché pour entrer à Harvard. Les écarts entre les scores des Noirs et des Blancs aux tests standardisés disparaissent dès qu’on intègre dans l’équation des critères comme la structure familiale intacte ou son absence. Les naissances hors mariage sont un problème important dans la communauté noire, mais le comportement sexuel relève de la volonté et non de l’ADN. Ceux qui pensent autrement devront prouver leur thèse au lieu d’introduire subrepticement leurs conclusions dans le débat par un tour de passe-passe. Il en va de même pour le comportement violent. Les naissances hors mariage expliquent beaucoup mieux pourquoi la criminalité est plus élevée chez les Noirs. Les enfants qui grandissent sans père manquent du sens abstrait du bien et du mal qui fonde le comportement social.

Le phénotype est une catégorie de la réalité ; ce n’est pas un impératif moral. Si je dis que la race est une construction sociale, on m’assaille de liens vers des articles sur les groupes haploïdes, des études en double aveugle et des techniques d’élevage canin, tout cela étant calculé pour réduire les sceptiques au silence. Je n’ai pourtant pas besoin d’un doctorat en génétique pour expliquer ce qu’est une construction sociale. Pour prendre un exemple que tout le monde connaît, l’ancien président Barack Obama est entré dans l’histoire comme le premier président noir des États-Unis, une affirmation qui assume le fait que son père était noir mais qui ignore que sa mère était blanche. Pourquoi Obama est-il donc noir alors qu’il est blanc à 50 % ? La seule réponse à cette question, c’est que la race est une construction sociale. Obama a été « rendu » noir pour des raisons politiques. Pour n’en citer qu’une : les démocrates s’étaient auto-proclamés le parti du Mouvement des droits civiques et voulaient s’attribuer la distinction d’avoir mis le premier président noir au pouvoir.

De la même manière, la distinction entre les esclaves celtes et les esclaves africains dans les plantations de tabac de Virginie a été transformée en « blancs » contre « noirs » pour des raisons économiques. Ces esclaves sont devenus respectivement blancs et noirs afin de diviser la force de travail en accordant des privilèges à l’un au détriment de l’autre et pour éviter une répétition de la rébellion de Bacon, au cours de laquelle Celtes et Africains s’étaient unis en tant que travailleurs contre les oligarques du tabac. Je n’ai pas besoin d’un doctorat en génétique pour avancer cette thèse, et personne titulaire d’un doctorat avancé en génétique ne peut la réfuter, car elle n’a rien à voir avec la biologie, mais beaucoup avec l’adoption par le Parti démocrate de la politique identitaire et les répercussions que cette décision a eues sur toute compréhension de l’identité américaine. Selon le tour de passe-passe que j’ai déjà décrit, le phénotype est utilisé comme base de la construction sociale appelée « race », laquelle possède désormais une signification normative.

Le virage des démocrates vers la politique identitaire a créé une crise identitaire. Ses principales victimes appartiennent à la génération des vingtenaires qui devraient se marier et fonder des familles, mais qui, au lieu de cela, ont été emprisonnés dans un monde en ligne fantasmé et fondé sur l’addiction à la pornographie, aux jeux vidéo et à l’identitarisme racial – par quoi j’entends la militarisation du phénotype blanc combinée à l’adulation d’Hitler et du IIIe Reich, qui est devenue une composante intégrale de groupes identitaires illusoires ne pouvant exister qu’à l’intérieur de l’environnement hors-sol de la culture internet.

[…]

Lorsque le pape Pie XI publia l’encyclique Mit brennender Sorge le 17 mars 1937, il dissipa ces illusions iréniques. Contrairement à Nick Fuentes, qui trouve Hitler « cool », le pape Pie XI vit dans le national-socialisme une idéologie païenne qui contredisait la foi catholique et qui conduisit à la persécution de nombreux prêtres catholiques, lesquels terminèrent à Dachau. Dans son encyclique Quadragesimo Anno de 1931, Pie XI avait affirmé que « personne ne peut être à la fois un bon catholique et un vrai socialiste ». Six ans plus tard, dans Mit brennender Sorge, Pie XI tint des propos analogues au sujet de la race, laquelle était incompatible avec le catholicisme pour des raisons différentes.

« Quiconque identifie, par une confusion panthéiste, Dieu et l’univers — soit en abaissant Dieu aux dimensions du monde, soit en élevant le monde aux dimensions de Dieu — n’est pas un croyant en Dieu. Quiconque suit cette prétendue conception germanique pré-chrétienne qui substitue au Dieu personnel un destin sombre et impersonnel, celui-là nie par là même la Sagesse et la Providence de Dieu qui « s’étend avec force d’une extrémité à l’autre et dispose toutes choses avec douceur » (Sagesse viii, 1). Lui non plus n’est pas un croyant en Dieu. »

Le pape plonge ensuite au cœur du sujet :

« Quiconque exalte la race, ou le peuple, ou l’État, ou une forme particulière d’État, ou les dépositaires du pouvoir, ou toute autre valeur fondamentale de la communauté humaine — quelle que soit la nécessité et l’honorabilité de leur fonction dans les choses de ce monde —, quiconque élève ces notions au-dessus de leur valeur normale et les divinise jusqu’au niveau idolâtrique, celui-là déforme et pervertit un ordre du monde voulu et créé par Dieu ; il est loin de la vraie foi en Dieu et de la conception de la vie que cette foi soutient. »

[…]

Tout comme les disciples de Jared Taylor, les nazis tentèrent de séduire les catholiques par l’usage équivoque de termes comme «race ». Confondre la race avec l’ethnie entretient une « confusion des concepts ou pire » car un état fondé sur la religion de la race et du sang est « l’antithèse d’une véritable communauté ethnique ». La religion de la race est un nouvel évangile. Ceux qui le prêchent, comme l’a déclaré Pie XI, à la suite de saint Paul « sont anathèmes » (épître aux Galates).

Si Nick Fuentes conduit l’Amérique à se perdre dans cette fausse religion de la race et du sang, la même malédiction s’applique à lui. Comme l’a dit Pie XI, « celui qui chante des hymnes de loyauté à sa patrie terrestre ne devrait pas, pour cette raison, devenir infidèle à Dieu et à son Église, ou un déserteur et un traître envers sa patrie céleste ». La conclusion est claire : personne ne peut être à la fois un bon catholique et un authentique racialiste. 

Pour aller plus loin :